Même si, quand on n’y connait rien, on voudrait réduire la direction à « bouger les bras devant des gens qui chantent », diriger une chorale implique l’ensemble du corps. Chaque partie du corps a un rôle à jouer pour produire un geste clair, précis et efficace, tout en ne brouillant pas le message avec des gestes parasites.
La tête
La tête crée le contact et l’échange avec les choristes. Par le regard, qui englobe et permet à chacun de se sentir concerné et impliqué. Par le sourire, qui invite à participer et crée une connivence de la musique partagée. Elle est libre, posée sur les cervicales, dégagée des épaules.
Comment se mettre en position ?
Bouge la tête avec des petits mouvements, comme un chien en plastique sur la plage arrière d’une voiture. Fais des petits Oui et des petits Non, en pensant les mouvements à partir du bout du nez et non de l’arrière de la tête. Tu y es, ta tête est prête à diriger.
Attention, la tête peut avoir envie de prendre les devants dans le geste, à la place des mains. Dans ce cas, la direction se retrouve à deux endroits à la fois, qui ne peuvent pas être parfaitement synchronisés, ce qui va entrainer une perte de précision. Le menton peut vouloir se lever lors des départs, ce qui ajoute des tensions et n’est pas du tout précis. Les lèvres peuvent mimer les paroles. Même si c’est parfois un soutien utile pour les choristes, autant le réserver pour des passages précis ou des mots à souligner.
Le torse
Le torse est le lieu de l’ouverture, qui invite les choristes à nous suivre, en leur partageant notre énergie. Le sternum est ouvert et actif, comme si un collier posé dans son creux diffusait une grande lumière qu’on voulait faire admirer le plus possible. Les épaules sont détendues, vers le bas.
Comment se mettre en position ?
Sur un bassin mobile, fais de grands cercles avec les épaules, vers l’arrière, lentement. Sens la position du sternum pendant ces mouvements, sois attentifs au moment où il est le plus ouvert.
Monte les épaules vers les oreilles puis lâche-les d’un coup. Tu y es, le haut de ton corps est prêt à diriger.
Attention, le haut du corps peut avoir envie de se déplacer vers l’avant pour aller chercher les choristes ou bien pour appuyer certains gestes. Même si ce mouvement n’empêche pas l’ouverture, il déséquilibre l’ancrage et brouille la lisibilité du geste.
Les bras
Les bras transmettent la tonicité du corps jusqu’aux mains. Ils sont le support du geste et déterminent son engagement. Ils sont à la fois détendus et toniques pour éviter toute tension ou mollesse. Dans le prolongement du haut du corps, il sont ouverts, légèrement écartés du corps. Selon son amplitude, le geste part soit de l’épaule, soit du coude, soit du poignet. Ces articulations sont donc les pivots du mouvement, engagées mais pas rigides.
Comment se mettre en position ?
Avec une main, soulève le poignet de l’autre main devant toi jusqu’à la hauteur du nombril. Le bras est détendu et lourd, il retombe lorsque tu lâches le poignet. Après avoir testé quelques fois le poids du bras, laisse ta main rester en l’air.
Mobilise légèrement chaque articulation pour sentir sa souplesse et son engagement. La main est dans le prolongement du bras, le poignet n’étant pas cassé (dans un sens ou dans l’autre).
Place un petit coussin entre les côtes et le bras, le tenir sans l’écraser. Enlève le coussin pour sentir l’espace dégagé. Tu y es, tes bras sont prêts à diriger.
Attention, les bras peuvent avoir envie de se tendre vers l’avant ou de s’écarter plus pour donner de l’emphase au geste. Cela entraine des tensions et rend le geste moins lisible. Ils peuvent également être trop serrés sur les côtes, ce qui donnera un son plus serré.
Les mains
Les mains sculptent le son, elles dessinent des formes dans l’espace qui font prendre vie à la musique. Elles sont souples dans le prolongement du bras, permettant de trouver l’énergie nécessaire pour s’adapter à l’émotion musicale recherchée. Les doigts restent plutôt proches les uns des autres pour éviter de laisser s’enfuir le son. La position des mains (direction de la paume, écart entre les deux, placement des doigts) s’adapte à l’intention recherchée.
Comment se mettre en position ?
Au bout des bras installés dans la souplesse, fais quelques tours de poignet. Les mains se placent dans le prolongement des bras, sans cassure du poignet. Ferme et ouvre les doigts plusieurs fois. Tu y es, tes mains sont prêtes à diriger.
Attention, les mains peuvent vouloir en faire trop. Elles se mettent alors à agrandir les gestes, ajouter des rebonds inutiles, s’avancer ou monter bien plus haut que le nombril. Dans ces cas-là, elles génèrent des pertes d’énergie et brouillent la lisibilité.
Les genoux et le bassin
Les genoux et le bassin font le lien entre l’ancrage des pieds et le haut du corps. Ils permettent la mobilité et la flexibilité de la posture. Ils sont déverrouillés au maximum. Les genoux sont donc un peu fléchis et le bassin ni en avant ni en arrière. Il peut faire des petits cercles si besoin. Ainsi, l’ancrage se propage à l’ensemble du corps, tout en souplesse.
Comment se mettre en position ?
Une fois les pieds bien ancrés, bouge le bassin d’avant en arrière et d’un côté à l’autre. Ce n’est possible que si les genoux sont déverrouillés. Une fois que tu as senti ces quatre points, fais des cercles, comme un houla houp lent. Réduis petit à petit les cercles pour arriver à une position centrale, fluide. Tu y es, tes genoux et ton bassin sont prêts à diriger.
Attention, dans cette souplesse, les genoux et le bassin peuvent décider de battre leur propre rythme. Cela se traduit par des rebonds ou des déhanchés qui, même s’ils sont en rythme, vont décaler le plan de travail, et surtout brouiller le geste en ajoutant une deuxième indication de tempo qui peut être en contradiction avec le reste. Dans ce cas, les choristes ne sauront plus quoi regarder et perdront en précision.
Les pieds
Les pieds sont les racines, les garants de la stabilité. Ni trop en avant, ni trop en arrière, mais bien ancrés. Le poids du corps se répartit entre les deux pieds, ce qui permet d’avoir un geste équilibré et de ne pas créer de tensions chez les choristes.
Comment se mettre en position ?
Pour sentir le bon placement, mets-toi debout, les pieds écartés de la largeur du bassin. Imagine une algue dans le courant ou un roseau dans le vent et penche-toi légèrement de chaque côté sans lever les pieds. Sens ce qui se passe sous ta plante de pied, comment le contact avec le sol se modifie, où se trouve le poids du corps. Fais la même chose d’avant en arrière, toujours en gardant le pied en contact avec le sol. Expérimente dans les quatre directions et retrouve une position centrale, neutre, où l’ensemble du pied est dans le sol. Tu y es, tes pieds sont prêts à diriger.
Attention, les pieds peuvent décider de donner la pulsation tout seuls. Si c’est bien utile, parfois, en répétition pour souligner un tempo ou synchroniser des musiciens, le laisser s’installer tout le temps nuit à l’efficacité du geste.
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